Lorsqu'il foula le sol de Rapa Nui, le dimanche de Pâques 1722, Jakob Roggeveen fit preuve d'une inspiration remarquable et lui donna le nom de... l'île de Pâques. Devenue célèbre pour ses Moais, l'île constituait pour nous une transition parfaite entre les cultures polynésienne et sud américaines.
De plus en plus organisés, nous avions pris la peine de réserver un emplacement au camping tipanie Moana, une heure avant le décollage. Ce camping nous avait été recommandé par Christelle, à Huahine (lire 'Huahine sous la pluie'), et elle ne s'était pas trompée. En plus d'être propre et bien équipé, il est tenu par l'excellent Benjamin, qui nous offrit de préparer et partager deux fois son dîner (ceviche et barbecue de poissons)!
Il y a quelque chose de marquisien dans l'île de Pâques. Certes, pas le relief - quasiment plat - mais plutôt dans l'atmosphère et l'état d'esprit des gens. D'ailleurs, les pascuans ne descendent-ils pas des marquisiens? Comme aux Marquises, il fait bon vivre et prendre son temps. Hanga Roa, ville principale de l'île, est à mi chemin entre Polynésie et Chili ; les empanadas rivalisent avec le poisson cru coco. Nous avons fait notre choix, et une cure d'empanadas! Et comme aux Marquises, les arts du tatouage et de la sculpture sont omniprésents. Les Moaïs en sont la meilleure représentation.
Les Moaïs. Ce sont eux qui ont rendue célèbre Rapa Nui. Symboles du culte des ancêtres, ils sont devenus la marque de fabrique pascuane, évoluant d'une forme marquisienne 'Tiki' vers leur forme si particulière (long nez pointu, grandes oreilles).
Il flotte un parfum de mystère autour de ces géants, dont on ignore finalement beaucoup de choses. Si l'on sait désormais où leur corps (carrière de Rano Raraku) et leur coiffe (cratère du volcan voisin) étaient fabriqués, nul ne sait comment celles-ci étaient acheminées et mises en place. D'après les spécialistes, les coiffes auraient été positionnées avant de relever les énormes statues.
De même, les avis diffèrent sur le moyen de transport utilisé entre la carrière et leur lieu de villégiature. Suite à des reconstitutions, il est acté qu'une cinquantaine d'hommes mettent près d'une semaine à tirer un Moaïs sur des rondins de bois, pour parcourir une poignée de kilomètres. L'explication est plausible, mais dans ce cas, quid de la légende stipulant que les Moaïs "marchaient" jusqu'à leur ahu? Un déplacement par mouvement de balancier (comme lorsqu'on déplace une armoire normande) permettrait d'expliquer cette légende. Le fait que la base des Moaïs soit concave dans la carrière (favorisant les mouvements de balanciers) et rectangulaire sur les ahu va dans le sens de cette théorie. Nous avons enquêté, et comme à Hiva Oa (lire 'Le mystère de la vache qui rit'), nous avons trouvé la véritable explication, que l'étroitesse de la marge ne peut malheureusement pas contenir...
D'après leurs témoignages, Dupetit de Thouars et Cook furent les derniers à voir des Moaïs debout. Le vent n'étant sans doute pas la cause de leur chute, il est possible que ceux ci aient été renversés lors des guerres de clans, usuelles vers la fin du culte. À moins qu'ils aient tout simplement été mis à terre par leurs propriétaires, désireux d'en faire fabriquer de nouveaux, plus grands, plus gros.
Toujours est-il que tous les Moaïs ont fini le nez dans le gazon, et que ceux que nous avons vu debout ont été relevés au cours du siècle dernier. Vanessa a tenté d'apporter sa contribution, sans succès : les Moaïs sont restés...de pierre!
Et des Moaïs, Dieu sait que nous en avons vu, au guidon de notre scooter de location! À commencer par la carrière de Rano Raraku, où ils étaient fabriqués. La visite de celle ci fut des plus instructives. Sur le haut de la colline, les statues à peine ébauchées étaient allongées sur le dos, puis relevées et amenées vers le bas du site pour être fignolées!
Ensuite, nous sommes allés voir le traditionnel coucher de soleil sur le site de Tahai, puis le lever, à Tongariki. Drôle d'aventure, que ce lever de soleil: partis sous un crachin automnal, nous foncions sur notre scooter, Vanessa au guidon, Renaud cramponné à l'arrière. L'aube était bien avancée au moment d'atteindre Tongariki, mais la cavale en valait la peine. Sur un site déserté (pluie et brouillard matinaux avaient rebuté les touristes), le spectacle des ombres se dessinant sur le gazon était magnifique.
La superbe plage d'Anakena, nichée au milieu d'une cocoteraie, est le lieu du plus grand mystère entourant les Moaïs: comment peuvent-ils rester imperturbables, alors qu'à une centaine de mètre d'eux on peut déguster de formidables empanadas garnies d'un filet de thon frais? Nous, on a craqué en moins d'une minute!
Des Moaïs, des Moaïs, encore des Moaïs! Nous en avons même vus sous l'eau! Eh oui! nous n'avons pas résisté à plonger à Rapa Nui, avec le club d'Henri Garcia, ancien équipier de Cousteau sur la Calypso. Bon, c'est sûr, Rapa Nui, c'est pas Rangi! Ici les eaux sont peu planctonneuses, donc peu poissonneuses, mais la visibilité est démente!!
Vendredi après midi, finalement, nous avons abandonné les Moaïs pour un autre centre d'intérêt de l'île: le volcan Rano Kau, et le site cérémoniel d'Orongo. Non seulement ses paysages sont magnifiques (même sous des pluies diluviennes), mais le site est le berceau de la culture post-Moaïs, celle que les leaders de l'île tentèrent d'imposer au XIXe siècle (lire 'le culte de l'homme oiseau').
Céline, rencontrée à Hiva Oa, nous avait surpris en disant qu'il faut rester un quinzaine de jours à l'île de Pâques. En effet, la plupart des gens conseilent 5 à 6 jours. Rapa Nui se vit, se découvre lentement, et réflexion faite, nous nous rangeons derrière son avis!
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