La légende raconte qu'un berger indien partit un soir à la recherche d'un de ses lamas égarés. Sa traque le conduisit sur les pentes du cerro rico (4900 m d'alt.) où, une fois la nuit tombée, il décida d'allumer un feu. Quelle ne fut pas sa surprise, lorsque du sol réchauffé commença à couler un filet d'argent! C'était en 1545. Il venait de mettre à jour un métal qui allait faire la grandeur de Potosi, mais aussi le malheur de millions d'esclaves.
Trouver une mine d'argent en pleine conquête espagnole n'était peut être pas la meilleure des idées. Rapidement, Pizarro s'empara de la ville, et mis au travail la population locale. Nécessitant de plus en plus de main d'oeuvre, l'Espagne importa alors des esclaves africains pour exploiter la mine. Seulement, après quelques semaines à fond de cales, ceux ci avaient un peu de mal à s'adapter à l'altitude, et le taux de mortalité était très élevé. Les colons décidèrent donc de se servir "à la source", et mirent en pseudo esclavagisme les populations de l'altiplano bolivien.
On dit - non sans un certain accent marseillais - qu'un pont reliant Potosi à Madrid aurait pu être construit avec l'argent extrait de la mine. Plus certainement, les ossements des esclaves des mines auraient pu constituer ce pont. 8 millions de morts sont communément annoncés : 2 fois la populatioin néo zélandaise, 2600 fois le crash des twin towers. Emmurés vivants, morts d'épuisement, intoxiqués par les odeurs ou rendus malades par les bains de mercure utilisés pour extraire les minerais, les périls ne manquaient pas. Aujourd'hui, le chiffre augmente encore, quoique plus lentement. La mine est toujours exploitée par des mineurs regroupés en coopérative, et sa visite est une sacré expérience. (lire 'Germinal')
Toujours est-il que la mine a placé Potosi sur la carte du monde: au XVII siècle, la ville était plus grande et plus riche que Paris ou Londres! En fait, elle était le nombril du monde, le poumon de l'Espagne.
À partir de 1753, la monnaie ibérique fut frappée dans l'immense casa de la moneda. La visite de ce bâtiment, transformé aujourd'hui en musée, nous en apprit encore sur l'histoire de la ville. Initialement, les pièces étaient frappées au marteau, puis sur de petites presses rotatives. Vint ensuite la grosse artillerie, avec 3 énormes presses rotatives, actionnées au sous sol par des mulets. Dans la série "Capital : améliorez la productivité de votre entreprise en réduisant les coûts", les espagnols se sont rendu compte que 20 esclaves africains pouvaient remplacer les 4 mules...
L'Espagne sortit toutefois ruinée des années "Potosi", ayant dépensé sans compter et ne sachant plus exporter de ressources naturelles. Quand on dit que l'argent ne fait pas le bonheur!
Mais si l'histoire de Potosi est irrémédiablement liée à celle de sa mine, la ville actuelle ne se résume pas seulement à ça. Animée, elle a gardé un charme fou grâce à ses nombreux bâtiments coloniaux, rappelant sa richesse et son faste perdus. Elle est maintenant la capitale hautement respectable du charango, ce petit instrument mi ukulélé, mi guitare! Samedi soir, nous avons d'ailleurs eut le privilège d'assister à une représentation endiablée dans le théatre municipal.
Auparavant, nous avions dîné avec Lucie & Nicolas, rencontrés pendant la visite de la mine. Ceux ci nous avaient vanté un plat typique de Bolivie : le pique macho. "Vous verrez, ils mettent de tout dedans, viande, saucisses, légumes! c'est délicieux!". Ce qu'ils ne savaient pas, c'est que le vrai pique macho se prépare avec du choloco, un piment à dépailler les chaises!! Un repas mémorable!
Et puis, comme un signe, c'est dans cette ville minière que Renaud a appris la victoire de son équipe favorite en coupe de la ligue, après 32 ans de purgatoire!
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